une quation plusieurs inconnues pour les communes

Posted by Valentine Belue on Sunday, May 5, 2024

A l'occasion des journées "Le sport en banlieue : une énergie positive pour la ville en crise" qu'elle organise les 22 et 23 mars à Allonnes (Sarthe), l'association Ville et banlieue rend publique une étude menée auprès de ses élus. Alors que l'association constate que les taux de pratique sportive dans les ZUS sont trois à quatre fois moins élevés que la moyenne nationale, la première interrogation de l'enquête porte sur les grands objectifs des politiques municipales. Une question découpée en deux phases : les priorités d'aujourd'hui et les thèmes de demain. Pour 27 des 29 villes interrogées*, les politiques actuelles visent "l'accès de tous à des pratiques de qualité", alors que la moitié met en avant "l'intégration sociale et culturelle des jeunes des quartiers" (15 réponses) et "la citoyenneté des jeunes et l'apprentissage des valeurs civiques" (14 réponses). Pour l'avenir, les thèmes qui devraient émerger sont beaucoup plus disparates et aucun ne se détache vraiment. Parmi les plus cités : le bien-être et la santé, l'implication des femmes et des pratiques féminines, le soutien aux pratiques handisport et le sport comme lien structurant de la famille.

7% du budget municipal

L'organisation des municipalités en matière sportive fait l'objet de la deuxième interrogation. Au sein de l'exécutif municipal, toutes les villes interrogées ont un ou une élu(e) au sport. Dans 22 cas sur 29, cette délégation est jumelée avec une autre. Par ailleurs, 26 des 29 communes interrogées ont un service dédié au sport, 14 possèdent un office municipal des sports et seulement 4 ont mis en place une commission extra-municipale des sports. Enfin, le budget dédié au sport dans les villes interrogées s'élève en moyenne à 7,31% du budget d'investissement et à 7,04% du budget de fonctionnement. "Ce qui est loin d'être négligeable", commente Ville et banlieue.
Côté équipements, toutes les communes déclarent avoir réalisé depuis 2008 des rénovations et des mises aux normes sur des "infrastructures vieillissantes" ; 12 ont réalisé de nouveaux équipements spécialisés ; 7 ont réalisé de nouveaux équipements polyvalents ; et 7 ont installé des structures de quartier et de proximité. De ces réalisations, il résulte que la moitié des villes (14) estiment "plutôt satisfaisants" leurs aménagements et équipements sportifs, alors que 6 les estiment "tout à fait satisfaisants" et 9 "plutôt à améliorer". Si les deux tiers des maires se disent satisfaits de leurs équipements, "c'est parce qu'ils en ont tous fait leur priorité", avance l'association.

La pratique libre plébiscitée par la population

Autre aspect intéressant : l'enquête de Ville et banlieue a croisé la nature des demandes les plus fortes en matière sportive, de la population, d'une part, des cadres et responsables sportifs, d'autre part. Ainsi, la population attend avant tout un accès libre aux équipements sportifs ou des pratiques encadrées non compétitives et hors fédération (10 villes sur 29). Cette revendication arrive juste devant des "moyens financiers, logistiques et en personnels" et "l'amélioration qualitative des équipements" qui concernent 9 villes de l'échantillon. De leur côté, les cadres et responsables sportifs revendiquent en priorité des créneaux horaires supplémentaires (dans 14 communes), des moyens financiers, logistiques et en personnels (9), une amélioration qualitative des équipements (9) et, enfin, des subventions, un événement ou des formations pour le haut niveau (5). Ces réponses recoupent le problème émergent de la pratique libre et de son encadrement par les pouvoirs publics et les fédérations (lire notre article ci-contre du 14 mars).

Menaces sur le sport

L'étude appelle ensuite à réfléchir sur les menaces qui pèsent sur l'esprit sportif. Pour 16 des 29 communes interrogées, il s'agit d'abord des contraintes économiques et financières, puis des difficultés du bénévolat (11), de l'évolution des comportements (8), de la montée des incivilités dans le football notamment (6), et enfin de l'évolution des contraintes administratives (6 réponses).
Mais ces difficultés ne sont pas les seules préoccupations des maires en matière de sport : pour 22 des 29 communes, l'Etat se désengage du soutien aux acteurs locaux, alors que pour 10 d'entre elles, il recentre son action sur le sport d'excellence, les grands projets et grands équipements. Sans surprise, 25 des 29 communes attendent plus de moyens financiers via le CNDS (Centre national pour le développement du sport) pour le sport dans les quartiers/communes en difficulté ; 17 espèrent des mesures de soutien et d'incitation au bénévolat ; et 17 comptent sur une politique forte de formation et de recrutement d'enseignants et cadres sportifs.
L'étude note encore que parmi les partenaires les plus actifs des politiques locales du sport, figurent au premier rang les autres niveaux collectivités territoriales (département, région). Au second rang, viennent les associations, locales et nationales - Association nationale des directeurs et intervenants des installations et structures sportives (Andiis) et Association nationale des élus en charge du sport (Andes) - dont les informations et conseils "apparaissent de plus en plus précieux". Quant aux fédérations, si elles sont perçues comme des partenaires incontournables de l'appui aux clubs et aux pratiques de haut niveau, leurs normes semblent excessives et parfois contraires aux objectifs des maires dans 24 des 29 communes.

Le sport a sa place dans la politique de la ville

Aspect incontournable de ce tour d'horizon, la place du sport dans la politique de la ville est une préoccupation des maires de banlieue. Dans deux tiers des cas, il fait partie intégrante du contrat urbain de cohésion sociale communal (Cucs), avec un volet spécifique dans 3 cas, alors qu'il est placé sous le volet éducation/jeunesse dans 9 cas et sous le volet prévention/citoyenneté dans 8 cas. Cette politique se traduit concrètement par la mise en place d'animations sportives de proximité et d'actions de prévention dans les "quartiers", par des opérations estivales ou encore par l'octroi d'aides financières aux familles pour la pratique du sport. A noter que pour 17 maires, le prochain Cucs devra intégrer spécifiquement l'action sportive.
Pour finir sur une note positive, Ville et banlieue rapporte "les actions sportives innovantes suscitant aujourd'hui le plus d'enthousiasme et de fierté parmi les maires de banlieue". Ces actions, selon l'enquête, rayonnent dans quatre directions : l'insertion des jeunes et l'intégration à la ville de tous les habitants ; la prévention et la citoyenneté ; la santé et l'environnement ; et enfin l'événementiel sportif à fort rayonnement.

Jean Damien Lesay

* Allonnes, Halluin, Bagneux, Ivry-sur-Seine, Bègles, Lormont, Bron, Montreuil-sous-Bois, Chanteloup-les-Vignes, Pierre-Bénite, Cachan, Rèze, Chenove, Saint-Denis, Coulaines, Saint-Jean-de-la-Ruelle, Cran-Gevrier, Sarcelles, Créteil, Sevran, Décines-Charpieu, La Seyne-sur-Mer, Echirolles, Sotteville-lès-Rouen, Epinay-sur-Seine, Soyaux, Grande-Synthe, Tremblay-en-France et Vitry-sur-Seine.
 

Des subventions contre une plus-value sociale du sport ?

A l'occasion de la rencontre des 22 et 23 mars sur le sport en banlieue, Renaud Gauquelin a lancé l'appel d'Allonnes. "Face à une politique nationale qui privilégie le sport de haute compétition, le sport événement, le sport business et marketing, les maires de Ville et banlieue et l'Agence pour l'éducation par le sport (Apels) interpellent les candidats à la présidentielle pour que soit engagée une révolution des politiques sportives dans notre pays, pour redonner au sport une ambition citoyenne dans nos quartiers populaires", a déclaré le maire de Rillieux-la-Pape et président de Ville et banlieue. Parmi ses doléances : un grand projet national d'université du sport en banlieue, la mobilisation de l'Etat au travers des prochains projets de rénovation urbaine ou de futurs contrats de la politique de la ville rendant obligatoire un volet sport. Cet investissement global doit, selon lui, "permettre une valorisation des métiers et une meilleure formation des acteurs locaux, en soutenant le renouvellement des équipes bénévoles, en imaginant de nouveaux métiers comme les éducateurs-médiateurs, en facilitant les recrutements, en accompagnant les pratiques innovantes..." "En contrepartie, ajoute Renaud Gauquelin, localement, les clubs et associations doivent s'engager à recréer du lien : les subventions pourraient être conditionnées à la réalisation d'action à plus-value sociale."
 

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